Entretien avec Yuko Harayama

« Il ne s’agit pas d’opposer l’homme à la machine mais bien de trouver une relation de collaboration idéale entre les deux »

Dr Yuko Harayama, directrice en charge des affaires internationales au sein de Riken et co-responsable du projet Future of Work au sein du GPAI

Quelle a été la mission attribuée à votre groupe de travail ?

Notre mission, qui a réuni 34 experts et un observateur de l’OCDE, a consisté à travailler sur l’impact de l’intelligence artificielle dans le monde du travail, en prenant en compte non seulement le facteur de la productivité mais aussi d’autres critères comme les conditions de travail des salariés. Notre volonté était de nous concentrer sur les pratiques existantes avant d’aborder les contours de ce que pourrait être l’intelligence artificielle dans le monde du travail du futur. Conformément au projet du GPAI, notre ambition est de réduire l’écart entre la pratique et la théorie.

Quels ont été vos axes de travail ?

Nos recherches nous ont conduits à explorer cette année le rôle des interactions entre hommes et machines.  Il ne s’agit évidemment pas de les opposer mais bien de trouver une relation de collaboration idéale entre les deux. Nous avons également exploré la question des biais dans l’intelligence artificielle : le choix des données de même que l’écriture des algorithmes ne sont pas toujours neutres. Or, l’amélioration des conditions de travail dans un contexte d’intelligence artificielle suppose que l’on s’appuie sur des données aussi proches de la réalité que possible. La formation nous est aussi apparue cruciale dans la façon d’appréhender l’IA dans le monde du travail : il est en effet important que les salariés bénéficient d’outils destinés à les aider à maîtriser ce nouveau contexte et à maintenir leurs niveaux de compétences.

L’un de vos projets consiste précisément à élaborer une plateforme d’observation. Quel est l’état d’avancement de ce projet ?

Cette plateforme est le résultat d’un certain nombre de cas d’études rassemblés grâce aux connexions de nos experts dans les entreprises. En nous appuyant sur la compétence de l’un de nos sociologues, nous avons pu établir des questionnaires envoyés par e-mails aux entreprises que nous avons doublés par des entretiens parallèles en présentiel. L’un des objectifs a été d’analyser l’impact des spécificités culturelles sur la mise en œuvre de l’IA en entreprises en nous fondant sur des cas d’études dans différentes géographies et contextes culturels.

Quelles ont les été les conclusions de ce projet et quelles sont vos recommandations ?

D’après nos analyses préliminaires, la mise en œuvre de procédés d’intelligence artificielle n’en est qu’à ses prémices. Dans certaines entreprises, les résultats n’ont pas été à la hauteur des attentes. Dans d’autres, le succès des premières expériences doit encore se confirmer sur le long terme. Car l’introduction de l’IA suppose une refonte totale des méthodes de travail en entreprise, ce qui exige un temps d’adaptation et de socialisation relativement long pour les salariés. Parmi les pistes de réflexion, nous avons aussi retenu l’hypothèse de la création d’un comité d’éthique extérieur aux entreprises, susceptible de donner un avis objectif sur leurs pratiques en matière d’intelligence artificielle.

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